A l’assaut des contreforts du massif alpin néo-zélandais dans le parc national Richmond Ranges
Changement de décor complet : nous quittons une bonne fois pour toute l’océan et la côte pour entrer dans le massif alpin. Nous suivrons cette épine dorsale qui court sur toute la longueur de l’île du Sud pendant les deux prochains mois. Cette zone montagneuse compte une quinzaine de sommets de plus de 3 000 mètres d’altitude dont le point culminant du pays, le Mont Cook ou Aoraki en maori, 3 724 mètres. Sur notre parcours, nous nous contenterons de franchir quelques cols aux alentours de 1 800 mètres d’altitude. Nous sommes très enthousiastes à l’idée de prendre un peu de hauteur.
Nous entrons dans le parc national des Richmond Ranges par un sentier qui progresse le long de la rivière Pelorus. Ce cours d’eau puissant se fraye un lit dans un univers chaotique composé d’imposants rochers. De nombreuses passerelles métalliques ont été installés pour permettre aux marcheurs de traverser en toute sécurité. Il faut parfois surmonter un peu sa peur du vide car les grands balancements des ponts de singes soulèvent le coeur mais ces passages procurent aussi un point de vue idéal sur l’eau vive au reflets verts émeraude. Le chemin est rocailleux. Les forêts de pins laissent place en altitude à un paysage de lande. Nous franchissons un petit col à environ 1 000 mètres d’altitude puis amorçons une descente vers le fond de la vallée jusqu’à Hacket que nous atteignons le quatrième jour.
Ce parc national comme tous ceux que nous traverserons dans le massif alpin compte de nombreuses cabanes, les fameuses « Hut ». C’est très plaisant de les découvrir au fur et à mesure de notre marche. Elles sont autant de petits « chez-nous » pour un soir. Nous apprécions leur rusticité, la chaleur de leur petit poêle à bois. Certaines sont placées dans des endroits idylliques, au bord d’un beau torrent de montagne, près d’un col avec une vue à cent millions de dollars, lovées dans une clairière au beau milieu de la forêt. Nous pouvons tout à loisir y observer la faune et la flore, écouter le chant des oiseaux, observer le défilement des nuages. Les jours de pluies, elles sont le réconfort, la promesse de pouvoir sécher ses affaires, de s’enrouler au chaud dans son duvet sur la petite couchette en bois en buvant une tasse de thé. Nous aimons y découvrir dans le registre, « l’Intention Book », qui sont les marcheurs ayant fait étape précédemment, leur nationalité. On y découvre parfois des commentaires amusants concernant la difficulté du sentier ou la météo pourrie. Nous suivons aussi quelques-uns de nos compagnons du Te Araroa : Keith, Hugh, Cory, Jan. Keith est loin devant. Hugh et Jan, aussi. Cory a dû s’arrêter à Wellington ou bien il est juste derrière nous. De nombreux nouveaux « trampers » ont commencé l’aventure au début de l’île du Sud. En effet, la plupart des randonneurs ne font que cette partie du Te Araroa car elle a la réputation d’être plus spectaculaire et puis, rares sont ceux qui sont prêt à parcourir l’intégralité du parcours, du nord au sud. Nous avons ainsi fait la rencontre de trois jeunes gens qui se lancent dans l’aventure sur la partie sud du Te Araroa. Il y a Martin, 25 ans qui vient d’Angleterre, Tash, la trentaine, étudiante en médecine, néo-zélandaise et puis Jessica, une jeune australienne de 18 ans, tout juste le BAC en poche, la benjamine. Nous sommes assez impressionnés par la volonté et le courage de cette dernière. S’élancer toute seule sur ce sentier n’est pas une mince affaire. Chacun avance a sa vitesse. Nous nous retrouvons parfois le soir dans les refuges selon le découpage des étapes que les uns et les autres ont choisi. En ce qui nous concerne, nous faisons un petit aller-retour à Richmond, la ville la plus proche pour nous ravitailler avant de repartir pour huit jours sur la deuxième partie de l’étape.
La suite du programme se révèle assez exigeante physiquement et techniquement. Ça y est, on est vraiment en montagne. Le premier jour après notre arrêt ravitaillement, nous grimpons vers le mont Starveall, environ 1 500 mètres d’altitude. Le temps se dégrade mais heureusement, nous arrivons à temps au refuge. Le vent souffle en rafale, les précipitations s’intensifient. On est contents d’être à l’abri. Le lendemain, bonne surprise, il fait grand beau. Nous suivons une ligne de crête vers le pic de Slaty. Après une pause déjeuner près d’une cabane, nous continuons sur les hauteurs. Sur le bord du sentier, nous trouvons Jessica assise, la mine déconfite. Nous la saluons chaleureusement, elle retient difficilement ses larmes. Elle nous explique combien elle est soulagée de nous retrouver. La veille, elle se trouvait sur la crête près du Pic Slaty quand la tempête s’est levée. Très rapidement, en raison du brouillard et de la pluie, elle ne voyait plus rien à quelques mètres. L’ennui, c’est que dans cette zone, il faut suivre des piquets oranges espacées d’environ 50 à 100 mètres. Elle a quitté l’un des marqueurs pour rejoindre le suivant mais l’a ensuite perdu de vue. Au moment où elle s’est décidé à faire demi-tout pour revenir au premier piquet, il avait disparu de son champ de vision comme effacé. Sans GPS, elle a tourné pendant deux longues heures en rond ne trouvant plus ni le sentier, ni la signalétique. Elle nous a raconté son effroi, la montée de la peur, la panique. Et puis, elle a réussi à se ressaisir et à l’aide de sa carte et de sa boussole, a finalement pu rejoindre le refuge, saine et sauve. Trempée jusqu’aux os et frigorifiée, la pauvre n’a pas réussi à allumer un feu dans le poêle car le bois était trop humide. Elle s’est endormie épuisée dans son duvet. Assise sur son rocher, là où nous l’avons trouvée ce matin, elle était entrain de se faire à l’idée d’abandonner la partie. Nous l’avons réconfortée du mieux que nous avons pu et nous lui avons proposé de rejoindre la team « Voyage En Marche » pour cette étape dans les Richmond Ranges. Jess’ est donc notre invitée spéciale cette semaine.
Nous décidons de dormir à Old Man Hut car c’est le dernier refuge avant la section la plus engagée du massif. La météo est bonne, le vent est complètement tombé, les conditions sont excellentes pour s’attaquer à l’ascension du Mont Rintoul, 1 731 mètres. Le sentier grimpe d’abord à travers la forêt puis au-dessus de la ligne de bush. Nous atteignons au bout de trois heures le sommet du petit Rintoul à 1 643 mètres. Une descente très raide dans des pierriers instables nous met un peu à l’épreuve. Nous enchainons avec une belle grimpette en petits lacets à flanc de montagne pour atteindre cette fois le point culminant de la journée. La vue est magnifique et porte jusqu’à la côte et la mer de Tasman. Jess’ a retrouvé le sourire. Nous sommes heureux tous ensemble là-haut. Cependant, il ne faut pas relâcher nos efforts, le sentier sur la crête est aérien. Heureusement, comme rarement en Nouvelle-Zélande, il n’y a pas une once de vent aujourd’hui. La descente est très exposée et glissante dans un nouveau pierrier puis le chemin plonge dans la forêt jusqu’à Rintoul Hut. L’étape du lendemain nous offre encore de belles sections sur les crêtes, notamment aux abords du mont Purple. Puis le Te Araroa entame une longue descente vers la rivière Wairoa. Nous retrouvons le soir Martin et Tash qui ont fait équipe pour traverser les parties montagneuse les plus engagées. La soirée est animée. Nous n’étions plus habitués à voir tant de monde d’un coup.

La pluie nous accompagne sur le milieu du parcours. La partie le long de la rivière Wairoa est très pénible. Le sentier est tracé à flanc de gorges, tantôt sur la roche, tantôt sur des zones de terres instables. Avant de transférer le poids du corps, nous assurons chaque pas car il y a de nombreuses zones effondrées. L’étroitesse du passage et le vide au-dessus du torrent tumultueux ne nous met pas franchement à l’aise. La roche mouillée est glissante, la prudence s’impose. Nous sommes soulagés d’atteindre un col après plus de quatre heures sur ce chemin difficile. La journée est encore loin d’être finie. Il nous reste un col à 1 400 mètres à passer. Donc, après la descente… on remonte! Cette étape de 10 heures nous a fait un peu tirer sur la corde. Nous décidons avec Pedro de prendre une journée de repos. Jess’ choisit de continuer avec Martin et Tash. Nous leur souhaitons bonne route. Nous retrouvons le soleil pour la fin de l’étape. L’univers minéral autour de Red Hills offre un paysage lunaire. Nous évoluons sur des roches vertes puis rouges. La rivière Motueka annonce la fin de l’aventure et le retour à la civilisation. Une dernière soirée dans le refuge de Red Hills Hut nous donne l’occasion de faire la connaissance d’Adrian, néo-zélandais de 70 ans, en route lui aussi pour la traversée de la partie sud du Te Araroa. En guise d’entrainement, ce jeune papy sportif vient de pédaler sur plus de 3 000 km en 1 mois depuis la Hollande, vers Lyon, puis les Cevennes et tout le massif Central. Ses mollets peuvent en témoigner.
Nous terminons la semaine à Saint Arnaud juste à temps pour que Pedro puisse souffler ses 31 bougies autour d’une pizza d’anniversaire et d’une pinte de bière… Joyeux anniversaire!
Bon anniversaire Pierre-Antoine, grosses bises de l’autre côté du globe !
Merci Marjorie.
J’ai lu un ouvrage : Chemin faisant – Jacques Lacarrière il parle du Bourbonnais, du Morvan j’ai pensé à toi.
Ps : Dans la montagne pas beaucoup d’éleveurs d’agneaux
Biz
J’en remets un couche via mon compte perso : « Bon anniversaire PA ! »
J’espère qu’à cette heure, tu n’as pas trop mal à la tête avec la bière car il faut conserver une forme olympique pour continuer le trek ! Il y a aura peut-être une trêve de Noël ?
Pour info, j’ai été impressionné par le haka donné à l’occasion des obsèques de J. Lomu !
Encore merci pour vos images et vidéos….
Jean-Louis
Salut cher ami,
Merci pour tes attentions cela me touche! Non pas de fiesta particulière, la marche amène une certaine sobriété. Noël nous serons dans la montagne, on s’y sens vraiment bien.
Nous n’avons pas trop suivi l’actu même si nous sommes au courant pour Jonah, c’est triste un sacré bonhomme.
Biz
bonjour les loulous,
nous suivons attentivement votre avancée dans ce monde si merveilleux. Vous me faite rêver et même que des fois, je serais heureux de faire un bout de chemin avec vous.
Gros bisous à vous deux
La famille GOUMS
Chers amis Goums,
Nous pensons souvent à vous. Comment va votre petite Clémence, notre Hélène et toi Goums tes premiers mois en tant que formateur?
Pour venir marcher avec nous, eh bien pourquoi pas! Nous allons réfléchir à organiser cela, peut être à notre retour vers Esse…
Biz
Merci de continuer à nous faire partager ces magnifiques paysages mais c’est bp trop dur pour moi!! Les huttes sont sympas et quelle chance de pouvoir y loger au chaud! C’est bien que Jessica ait pu continuer avec vous; c’est trop dangereux toute seule!
Bon anniversaire à Pedro avec un peu de retard et bonne continuation. Nicole
Merci Nicole pour ce petit mot et pour mon anniversaire…
Oui les « huts » sont bien agréables quand vient le soir.
C’est vrai que la montagne est dangereuse mais Jess est expérimenté elle a de bons réflexes.
biz